Contre-vérités en boucle dans les médias sur le contrat d’accès aux soins!

France info, entre autres médias, a diffusé dans de nombreux flash infos du 1er décembre 2013 des informations erronées concernant l’entrée en vigueur du contrat d’accès aux soins (CAS). La radio a répété en boucle que 70% des médecins de secteur 2 (soit 18 000 médecins) (à honoraires libres) avaient signé le CAS. Ce dernier serait donc un succès et devrait améliorer l’accès aux soins de millions de Français.

 Sur un plan purement factuel, cette présentation est très éloignée de la réalité.

Les derniers chiffres de l’assurance maladie sur l’adhésion au CAS sont de 8611 signataires, dont plus de 2000 viennent du secteur 1 (anciens chefs de clinique qui étaient bloqués depuis 1990 en secteur 1). Il y a au grand maximum 30% des médecins libéraux de secteur 2 qui ont signé le CAS. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’assurance maladie a fait signer (par la CSMF, MG France, FMF et SML) en catastrophe en novembre un avenant 11 à la dernière convention supprimant le quota de 33% des médecins libéraux de secteur 2, indispensable pour que le CAS puisse entrer en vigueur (avenant 8 signé en octobre 2012).

 http://www.lequotidiendumedecin.fr/actualite/convention/contrat-d-acces-aux-soins-l-ufml-naura-pas-les-chiffres

Outre cette question du nombre d’adhésions, il serait utile de s’interroger sur les bénéfices de ce CAS pour les usagers du système de santé. Pour améliorer l’accès aux soins, le CAS doit se traduire par une diminution du reste à charge payé par le patient. C’est pour cela qu’en parallèle de la signature du CAS, il était prévu que les complémentaires santé remboursent intégralement les compléments d’honoraires des médecins ayant adhéré à ce CAS. Et bien, ce ne sera pas le cas!! L’UNOCAM (qui représente les complémentaires) a annoncé il y a quelques jours qu’elle se retirait du processus et que son engagement d’octobre 2012 ne tenait plus!!

La situation est donc la suivante:

 – Plus de 2000 médecins qui ne faisaient pas dépassements d’honoraires sont maintenant autorisés à en faire;

– Les quelques 7000 médecins de secteur 2 qui ont signé le CAS, pensant que leurs patients seraient mieux remboursés vont pouvoir leur annoncer que ce ne sera pas le cas. Leurs honoraires seront bloquées pendant trois ans en contrepartie d’une subvention de l’Etat de leurs cotisations sociales et d’un flicage trimestriel de leurs activités par la sécu (il existe une contrepartie à une subvention, ici c’est la perte partielle de son indépendance professionnelle);

 Sans compter que le coût du CAS pour l’assurance maladie va être colossal:

– Autour de 100 millions € pour la prise en charge des cotisations sociales des médecins signataires;

– Un coût administratif très élevé de suivi trimestriel de l’activité des médecins signataires;

– Une hausse des volumes des actes très probables des médecins signataires, et donc une baisse de qualité pour les patients (temps réduit de consultation),  sachant que ces derniers se sont engagés à ne pas augmenter leurs honoraires pendant 3 ans.

Trouver qu’une telle initiative  soit formidable est le droit de chacun mais qu’une radio, financé par nos impôts, soit obligé de diffuser en boucle des informations erronées montre d’une part l’état de délabrement de notre démocratie et d’autre part que ce CAS ne doit pas être si formidable que cela!

Les médecins signataires et les usagers vont vite s’apercevoir que ce n’est qu’un marché de dupes!

Frédéric Bizard

Frédéric Bizard

Frédéric Bizard, est un économiste spécialiste des questions de protection sociale et de santé. Il est professeur d'économie affilié à l'ESCP Europe et enseigne aussi à Paris Dauphine. Il est Président fondateur de l'Institut Santé.

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